BARBARA LEFEBVRE IMPARABLE

BARBARA LEFEBVRE IMPARABLE

Messagepar Nina » Juin 13th, 2018, 7:45 am

Médine au Bataclan : «Affrontons nos adversaires sur le terrain des idées, pas au tribunal !»

FIGAROVOX/TRIBUNE - En désaccord avec une liberté d'expression à géométrie ou lieu variable, Barbara Lefebvre refuse de demander l'interdiction du concert du rappeur. Cependant, elle appelle à un réarmement intellectuel et moral face à l'islamisme ordinaire.


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L'annonce du concert du rappeur Médine au Bataclan indigne, secoue les réseaux sociaux, obligeant politiques, polémistes et intellectuels de salon à s'en mêler parce qu'il faut avoir quelque chose à dire même quand on n'a pas un peu enquêté, voire qu'on ignore qui est Médine, qu'on n'a jamais écouté une seule de ses «chansons». Tous à vos tweets! Aussitôt écrits, aussitôt perdus dans le néant des réseaux sociaux. Et le panel de nos procureurs Pinard est de sortie en appelant, qui à la justice, qui au ministre de l'Intérieur pour faire interdire ledit rappeur, sans doute ravi de cette publicité gratuite, de cette occasion servie sur un plateau pour se victimiser, de la perche tendue à l'argument du «deux poids deux mesures» et j'en passe. Ses fans jubilent, ils n'en attendaient pas moins de la «République coloniale, raciste et islamophobe». Tout le monde est dans son rôle, dans sa caricature.

Les pourfendeurs de Médine, que l'on a bien peu entendus quand il vendait paisiblement des milliers de disques, s'agitent pour la préservation de la valeur commémorative du Bataclan. C'est une façon quelque peu légère de mener le combat contre l'islamisme puisqu'apparemment ils tiennent Médine pour un islamiste qui profanerait le lieu du carnage que l'on connaît ; que n'ont-ils dénoncé les textes de ses raps avant ? À moins qu'il ne s'agisse d'une émotion collective, type «peluches et bougies», qui retombera comme elle est venue puisqu'elle n'est pas portée par un sous-jacent politique suffisamment puissant pour une action cohérente.
Certains réclament son exclusion du Bataclan en invoquant fièrement l'interdiction des spectacles de Dieudonné comme si cela avait été une victoire. Outre que ce dernier continue à remplir les salles de spectacle, sa chaîne Youtube engrange toujours des abonnés pour atteindre 256 000 fans. Médine lui en affiche 259 000, presque à égalité avec celui qu'il soutenait il y a quatre ans en faisant une quenelle dans les studios d'une radio, photo postée fièrement sur les réseaux sociaux. À titre de comparaison, les chaînes Youtube du Rassemblement National et de la France insoumise affichent respectivement 17 550 et 37 447 abonnés…


Acter en justice contre la location du Bataclan à Médine ? Sur quels motifs: trouble à l'ordre public ? Que je sache, les concerts de Médine ne dégénèrent pas en bagarre générale sur la voie publique puisqu'aucun groupe d'opposants ne s'est encore risqué à un affrontement physique avec ce type de public. «Apologie du terrorisme» ai-je entendu. Je souhaite bien du courage aux avocats pour prouver cela devant une cour : Médine Zaouiche est bien trop malin dans ses textes (encore faut-il se donner la peine de les lire avant de parler) comme dans ses prises de parole publiques pour se faire attraper sur ce terrain. Médine, c'est l'apôtre vivant du «pasdamalgame», du «not in my name» quand ça arrange sa stratégie politico-artistique. Presque à coup sûr, le tribunal lui donnerait raison, à l'instar d'Orelsan relaxé en appel en 2016 des accusations de provocations à la violence à l'égard des femmes.

Il serait temps d'en finir avec la judiciarisation du débat d'idées qui fait le jeu des ennemis de la démocratie, d'autant que ceux-ci se retrouvent tantôt sur le banc des prévenus, tantôt sur celui des parties civiles. Le ridicule tue la justice.

Ce grand détournement du droit mine notre esprit public, cela devrait sérieusement nous interroger au lieu de pratiquer la surenchère légaliste, aujourd'hui avec Médine.
Certes c'est le gagne-pain d'un grand nombre d'associations qui n'ont ni réelle existence publique, ni intérêt démocratique, mais ce fut l'erreur de la loi Pleven (1972) dans son article 48 d'avoir habilité les associations à mettre en œuvre l'action pénale. Elles se sont ainsi substituées à l'État et lancé dans la poursuite pénale de toute pensée déviante à leurs yeux ; depuis, tout froissement de susceptibilités communautaires peut vous valoir un procès de nos jours. Ainsi, les juges se sont mis à devoir sanctionner la pensée davantage que les faits. Dès lors, la notion de liberté d'expression a perdu sa boussole.


«Faut-il ou non interdire Médine au Bataclan?». Et c'est reparti pour un tour de médias et leurs débats prétendument pluralistes qui finissent toujours par un jeu de somme nulle, emblématique de notre époque du «et en même temps»… Débat en plateau qui finira par s'éteindre comme tous les débats de ce genre sans qu'il ne débouche sur aucun réarmement intellectuel et moral de l'opinion, sans que soit enfin débattue sans langue de bois la question de la censure au bénéfice d'un politiquement correct qui érode toutes les aspérités de la pensée pour la réduire à une doxa libérale-libertaire mollassonne largement rejetée par les opinions occidentales. Le refus de la censure est une condition de la lutte contre l'autocensure qui en découle invariablement et qui a progressivement désarmé l'intelligence collective. Cette autocensure faite de culpabilisation, de reductio ad hitlerum dès qu'une critique du «monde qui est et qui vient» est prononcée. Il est plus facile d'interdire que de discuter pied à pied une idéologie suprématiste antidémocratique qui utilise les instruments légaux pour avancer, qui nage dans le droit-de-l'hommisme et l'antiracisme (dévoyé) comme un poisson dans l'eau, l'eau saumâtre de tous nos renoncements à défendre notre modèle de civilisation.

Médine et ses managers ont-ils tendu un piège au propriétaire du Bataclan, le groupe Lagardère? C'est d'abord à ce dernier qu'il faut demander d'expliquer ce choix de programmation, avant de s'en prendre à Médine qui aurait tort de se priver d'un si beau symbole: chanter au Bataclan ses titres Don't laïk ou Qui veut la paix dont le refrain commence en fait par «Prépare la guerre avant la perte de mémoire», où il compare notamment les policiers à des croisés. Médine sait rassurer son public de victimes trans-générationnelles: «présente mon Tiers-monde l'avantage du surnombre» et annonce «Je suis en mode Jihad, parole de père et de fils d'Abdoulaye / Prépare la guerre, tu veux la paix, prépare-toi». Il chantera sans doute fièrement «Jihad», peut-être après une minute de silence pour les victimes du 13 novembre (plus c'est gros et plus ça passe). Dans cette ode à l'amitié entre les peuples version médinoise, il dénonce la férocité des guerres en se drapant dans ses subtiles distinctions spiritualistes entre le jihad intérieur et le jihad guerrier que nous autres mâles et femelles blancs ne pouvons pas comprendre. C'est de tout cela qu'il faudrait parler avec le propriétaire de la salle, Médine n'est qu'un locataire occasionnel.

Censurer est une erreur, une faute intellectuelle. La censure préventive n'existe heureusement plus depuis la loi de 1881 sur «la liberté de la presse». Mais cette loi porte mal son nom puisqu'elle consiste à l'entraver en statuant sur des dizaines d'infractions qui ont conduit avec le temps à un degré d'autocensure incompatible avec la liberté d'expression. L'autocensure n'est pas le déni, l'autocensure conduit à la frustration de ne pas pouvoir dire une réalité qui nous révulse, elle nourrit ce recul du consentement démocratique qui finalement fait le lit des ennemis de la démocratie. Fini le temps des coups d'État. Pour renverser la démocratie, le meilleur moyen reste de la gangrener par l'instrumentalisation de ses lois. Puisque nous avons décidé d'opter pour le modèle de l'État de droit nécessaire à l'abandon des souverainetés nationales, prélude au projet postnational européen, nous devons être conscients que les coups d'État ne se réalisent plus en quelques jours - voire quelques heures quand ils étaient bien préparés - mais en plusieurs années voire décennies par le grignotement patient du «bien commun» et de l'intérêt général, principalement dans les prétoires, avant de gagner les parlements. Ainsi l'État de droit pourra être renversé par le retournement de ses principes contre lui-même puisque, selon ce modèle, la loi prime sur le pouvoir politique, c'est-à-dire finalement sur le peuple souverain.

La soumission du politique et de l'État au droit nous a conduits à la République des juges, qu'ils siègent à Paris ou à Luxembourg.

Cette judiciarisation du débat public est délétère pour la démocratie, pour la libre expression politique et culturelle. On traduit devant les tribunaux les écrivains, les journalistes, les historiens, les artistes… Les ligues associatives de vertu occupent le terrain judiciaire et sont désormais les chiens de garde du politiquement correct. L'État n'a plus qu'à suivre en envoyant le Parquet aux trousses des mal-pensants. Parfois il se ressaisit, comme dans le procès contre Michel Houellebecq, et soutient le prévenu, mais ce sursaut de lucidité devant l'instrumentalisation du droit est fort rare comme en ont témoigné l'attitude du Parquet dans les récents procès politiques contre Georges Bensoussan ou Éric Zemmour, pour ne citer qu'eux.

Je suis personnellement favorable à une totale liberté d'expression, y compris pour les ennemis de la démocratie, de Faurisson à Bouteldja en passant par Soral et le CCIF. Je m'oppose donc à toute censure, exceptée celle visant à la protection physique et psychique des mineurs. En toute logique, je suis aussi opposée à toutes les législations s'occupant de faits historiques, qu'il s'agisse de les protéger de leurs négateurs, de les commémorer, de les condamner ou de les glorifier.

L'histoire ne se fait pas dans les prétoires, elle se fait d'ailleurs sans que les hommes en aient souvent conscience bien qu'ils pensent la faire - arrogants qu'ils sont. Certains audacieux pensent même pouvoir en inverser son cours ou plus naïvement «éviter qu'elle ne se répète». L'histoire n'est pas une mécanique, elle est là comme un amoncellement de faits disparates qui prennent sens à distance. Et plus la distance temporelle est grande, plus elle témoigne ardemment pour notre présent. Il nous reste à l'interpréter avec toute l'honnêteté intellectuelle possible, pas à la juger. Et certainement pas à l'utiliser pour justifier nos actes de censure en vertu d'un combat idéologique que nous refusons de mener ici et maintenant et que nous renvoyons donc devant un juge, un préfet ou un ministre qui auront pour mission de clore le débat par leur sentence.

Si on ne laisse pas s'exprimer les ennemis de notre démocratie, de notre modèle de civilisation, comment peut-on espérer un réarmement idéologique de l'opinion pour engager contre eux la résistance et la lutte qui viendra ? C'est à croire que les élites médiatico-politico-judiciaires veulent éviter que «les gens» aient l'idée de se réengager intellectuellement, politiquement, culturellement contre ce qui les révolte au quotidien depuis au moins deux décennies, à savoir la sécession sociale, politique et culturelle d'une partie de la population qui hurle sa haine de la France, dans ses raps, ses colloques décoloniaux, ses livres racistes. Et comme l'histoire nous l'a appris, ce ne sont jamais les minorités qui nous font basculer d'une période à une autre, ce sont les minorités idéologiques agissantes. Comme le disait De Gaulle, «le plus important pour une minorité c'est d'être majoritaire quelque part».

De la France giscardienne à la France chiraquienne en passant par la mitterrandienne, les Français inquiets, troublés, ont été traités de Dupont Lajoie, de beaufs. «Circulez, y'a rien à voir». Mais un basculement s'est opéré après le 11 septembre 2001 et l'irruption dans nos vies, sur nos territoires, de l'hégémonisme islamique qui progressait silencieusement chez nous depuis le début des années 1990 et avait déjà fait le malheur de tant de nations arabes dont le peuple algérien qui ne s'est toujours pas remis de la «décennie noire» ; à noter que cette guerre d'Algérie-là n'intéresse pas les indigénistes ou Médine qui, en bons bouteflikiens, n'ont en ligne de mire que celle conduite par leurs ancêtres contre les «chiens de colons», les fameux «sous-chiens» de Bouteldja. Depuis le milieu des années 2000, ces excommunications prononcées contre les Dupont Lajoie mal-pensants par les grands bourgeois cosmopolites ont vécu ; d'ailleurs quelques-uns de ceux qui s'adonnaient plaisamment à ce mépris de classe (en fait un mépris du peuple français qu'ils ne connaissaient que de vue) s'en repentent depuis quelques années et sont, à leur tour, devenus des beaufs réacs aux yeux des bien-pensants multiculculs.

Les Dupont Lajoie se déculpabilisent lentement mais sûrement. Les réseaux sociaux les y aident car ils ont le sentiment de ne pas être aussi seuls qu'ils l'imaginaient. Ils y constatent surtout l'extraordinaire diversité de cette «beaufitude» tant méprisée par la bonne société. Tant de Français de tous âges, de tant de souches, de tant d'horizons politiques et culturels différents qui ont un intérêt commun: la défense de leur patrie. Mot désuet pour certains, mais qui fait sens pour eux, et qui fera peut-être corps un jour. Ils aspirent à se réarmer idéologiquement, ils voudraient bien qu'on les guide mais les politiciens sont trop occupés à construire leurs plans de carrière dans leurs partis ou leur plateforme métapolitique… Ils disposent de quelques esprits libres pour les engager à lire et relire certains de nos grands auteurs qui ont pensé cette «France des robots» dans laquelle nous baignons, ces auteurs qui nous offrent les armes intellectuelles pour résister, car la guerre est idéologique, culturelle. Elle sera peut-être autre chose un jour mais cela est imprévisible, tandis que produire une pensée structurée pour contrer l'ennemi, c'est de tout temps, c'est maintenant. Ces esprits libres qui pourraient guider cette résistance intellectuelle sont rarement invités dans les médias généralistes. Trop intellos, pas assez «bons clients». Mais si nous avions un espace médiatique véritablement démocratique à leur offrir, ils auraient toute leur place pour redonner du souffle et du corps à une certaine pensée française.

Médine, Dieudonné, Bouteldja, Belattar, Muhammad, Soral… Affrontons-les sur le terrain des idées puisqu'ils prétendent ne jouer que sur celui-là, apôtres du pacifisme qu'ils sont. Le face-à-face idéologique doit enfin être possible, autorisé, public, ouvert. Et qu'on ne nous demande plus de faire attention aux susceptibilités de telle ou telle communauté, pas de sensivity readers / speakers, plus de relecture par l'avocat de la maison d'édition qui change tel article indéfini ou tel adjectif. Il nous faut ce vrai débat d'idées, dégagé de la pesanteur judiciaire, où on pourra enfin mettre les mains dans le cambouis, où on pourra poser et peser tous les mots (les maux?) qui fâchent. Pas d'animateur-arbitre qui clôt le débat d'un «et en même temps», car dans un beau et vrai débat, pour l'opinion, il y a toujours un gagnant et un perdant. Où est le Michel Polac dont notre télévision aseptisée a tant besoin ? Et trouverait-on assez de courageux pour venir y croiser le fer avec les indigénistes, les racialistes, les islamogauchistes, les relativistes de tous poils ? Eux-mêmes y viendraient-ils? En écartant du débat certaines figures de ces milieux, on les a renforcés: ils ne vivent que de la victimisation. Ségrégationnistes par principe, ils ne veulent pas débattre dans le cadre du pluralisme démocratique. Ils ont l'ambiance feutrée et réglementée des prétoires pour crâner et faire croire à leurs clientèles qu'ils combattent l'infâme République raciste. Dans la pénombre de la cour, à l'abri des regards du grand public, ils ne risquent pas qu'on les voit publiquement humiliés par leurs contradicteurs, ce qui arrive souvent devant les tribunaux où la vacuité de leurs argumentations est révélée pour qui lit les rendus de justice. Au lieu de les censurer, sortons-les de l'ombre où ils prospèrent, laissons les prendre la lumière la plus crue possible pour éclairer l'opinion sur les mécanismes idéologiques à l'œuvre derrière ces groupes sécessionnistes. Arrêtons de mettre la poussière sous le tapis pour acheter la paix sociale, le temps n'est-il pas venu au contraire de tout mettre sur la table ?




Nina
 
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Re: BARBARA LEFEBVRE IMPARABLE

Messagepar Yéhoudidi » Juin 13th, 2018, 4:26 pm

trop long
Yéhoudidi
 
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